La publication en-ligne, c'est à dire via un réseau numérique n'est pas née avec le web, pas plus que la navigation hypertextuelle.
Paul Otlet, un des fondateurs de la documentation moderne et père de la classification décimale universelle, imagine dès 1934 un répertoire bibliographique universel, une « Encyclopédie universelle et perpétuelle » et des télescope permettant de lire les livres à distance. Vannevar Bush rêve, en 1945, d'un « memory expander » (Memex), préfiguration d'une base de données regroupant toutes les connaissances et accessible de partout. Pour le Memex, une armée de documentalistes construiraient en permanence des liens entre documents. En 1957, Joseph Licklider, le principal promoteur d'ARPAnet, est un lecteur de V. Bush. Il imagine concrètement un réseau de « centres de pensée » constitués d'ordinateurs contenant de gigantesques bibliothèques, sur tous les sujets, ainsi que des consoles permettant de tout visualiser à distance. Dans le domaine littéraire, citons la nouvelle Le jardin aux sentiers qui bifurquent (1941) de J. L. Borgès, qui peut se lire de façon hypertextuelle. Le mot hypertexte n'est forgé qu'en 1963, par Ted Nelson, qui œuvrera pendant des années pour tenter de construire un système d'information hypertextuel mondial, Xanadu [Flichy, p. 77]. Son projet n'aboutira pas en tant que tel, mais conduira au logiciel Hypercard (1987), sur Macintosh, qui aura beaucoup d'influence.
Concernant la publication en ligne, on trouve les bulletin board systems (BBS), à la fin des années 1970 et durant les années 1980 aux USA (notamment) et, en France, le Minitel dans les années 1980. Évoquons aussi, les newsgroups Usenet. Ce dispositif est créé en 1979. À cette date, ARAPAnet ne réunissait qu'un 8e des départements informatiques étatsuniens [Flichy, p. 71-72]. Divers autres réseaux sont donc lancés à cette époque, notamment pour ceux qui ne bénéficient pas d'ARPAnet. Usenet est l'un d'entre eux ; il a une croissance très rapide : en 1982, 400 sites sont reliés, contre 200 seulement pour ARPAnet. En 1982 des passerelles sont établies entre Usenet et Internet. En 1988, il s'ouvre au public non universitaire. Sur Usenet, puis donc Internet, les newsgroups étaient des forums de discussion très similaires, dans leur fonctionnement, aux forums web actuel. La forme des posts était similaire à un courrier électronique (au départ sans réellement de pièces jointes).
Le premier système d'information distribué, à l'échelle d'Internet fut constitué par l'ensemble des serveurs FTP “anonymes”, c'est à dire qui ne demandaient pas d'identification des utilisateurs. Ces serveurs étaient de différents types. Il pouvait s'agit de simples serveurs de laboratoire ou de département, publiant des documents scientifiques ou des logiciels. Cela pouvait être également de grands dépôts de logiciels gratuits (freeware) ou de partagiciels (shareware). Enfin, pour limiter l'emploi de bande passante et la charge sur les serveurs populaires, nombre de ces dépôts étaient répliqués sur des serveurs dits miroirs accessibles au plus près des utilisateurs. Cette organisation n'est pas sans rappeler l'organisation actuelle des sites, des grandes plateformes d'hébergement et des CDN. À ces serveur s'ajouta plus tard un moteur de recherche, Archie (1990). Suivirent le système Gopher (1991) et son annuaire Veronica, qui rencontrèrent immédiatement un immense succès. En 1993, le service connut encore une croissance de 1 000 %. Ce service permettait de faire des liens de serveur à serveur, mais pas encore de document à document. Enfin arrivèrent le web et ses annuaires et moteurs de recherche. Tim Berners-Lee formule une première proposition de système d'information en 1989. En 1990, il diffuse un premier navigateur. En 1991, il publie le HTTP, le HTML et lance le World-wide web project. Le web commence à se répandre en 1993. C'est aussi cette année-là qu'Internet devient grand public, grâce notamment au web, mais aussi à l'ouverture d'Internet au secteur privé (1991). Les publications papier à propos d'Internet explosent en 1993-1994 [Flichy, p. 16, 43, 113, 250] et les opérateurs d'accès à Internet se développent. Le système des URL est publié en 1994 [RFC1738]. Le premier spam (et sa théorisation) date de 1994, œuvre de deux avocats (dont l'un sera rayé du barreau quelques années plus tard pour publicité mensongère) [Flichy, p. 230-231].