Chapitre 4. L'ère de la “loi” de Moore

Table des matières

1. La miniaturisation
2. La “loi” de Moore
3. La suprématie du logiciel et des périphériques
3.1. Émergence et spécialisation des systèmes d'exploitation
3.2. Multiplication des langages de programmation
3.3. Extension à de nouveaux usagers
4. Internet, «réseau galactique»
4.1. Les légendes du réseau
4.2. Une interconnexion des réseaux
4.3. Un réseau “galactique”
5. La convergence numérique
6. La publication en-ligne
Bibliographie

Cette période fait suite, par rapport à la précédente, à une mutation profonde tant de la technique de construction, que de la population des utilisateurs, que des usages et, plus généralement, d'une ambition nouvelle pour l'ordinateur. Durant cette période, l'ordinateur devient un produit de masse qui se répand dans de nombreux foyers. Cette période va, grossièrement, du milieu des années 1970, avec l'inversion de la loi de Grosh (1974) à la fin des années 1990, avec la maturité du Web.

1. La miniaturisation

La miniaturisation, amorcée avec l'utilisation du transistor (2e génération), considérablement accrue avec l'utilisation des circuits intégrés (3e génération), gagne encore un ordre de grandeur dans la puissance disponible avec l'utilisation des microprocesseurs (on parle parfois de 4e génération). L'essentiel de l'ordinateur est maintenant regroupé sur une puce unique : le microprocesseur. Ce saut qualitatif considérable va amener une rupture majeure dans les usages et la pénétration de l'ordinateur dans la société.

Le premier saut qualitatif est l'inversion de la loi de Grosh, qui intervient en 1974, et peut marquer le début de ce que nous appellerons l'« ère de la loi de Moore ». Cette inversion est le fait qu'à partir de 1974, le nombre d'opérations par seconde et par dollar (de coût d'ordinateur) est bien moindre avec de petits ordinateurs. Avant 1974, en revanche, la productivité informatique était en faveur des gros ordinateurs. De ce fait, il devient donc économiquement plus intéressant de multiplier les ordinateurs plutôt que de pousser au gigantisme. Les séries de production se multiplieront, avec la miniaturisation, et les ordinateurs deviendront de moins en moins chers, à puissance égale. Bien entendu, cette évolution se fait progressivement et la date de 1974 ne doit pas être entendue au pied de la lettre : les gros systèmes ne disparaissent pas du jour au lendemain, ils sont remplacés, peu à peu par les mini-ordinateurs, puis les micro-ordinateurs. Les gros ordinateurs continuent à être vendus, en nombre restreint, même si leur intérêt relatif a diminué.

Le premier microprocesseur, l'Intel 4004, sort en 1971. La micro-informatique, professionnelle, puis personnelle se développe ensuite à partir du milieu des années 1970. En 1972, François Gernelle (1945-) conçoit le premier micro-ordinateur, le Micral N, autour du microprocesseur 8008 d'Intel. Celui-ci suscite de nombreux émules, principalement à destination des hobbyistes, dont beaucoup en kit, vendu quelques centaines de dollars seulement. Parmi eux l'Apple I (1976), rapidement suivi de l'Apple II, qui s'imposa largement dans le secteur des hobbyistes. À la fin des années 1970, Apple a la plus forte croissance du secteur. IBM lance alors, en 1981, l'« ordinateur personnel », le PC, avec une architecture standardisée garantissant une compatibilité ascendante (les « compatibles PC »). L'ordinateur est désormais largement accessible aux particuliers (non nécessairement hobbyistes). Le nombre de machines explose, y compris après les chocs pétroliers. Avant de vendre des ordinateurs, IBM et les autres grandes compagnies vendent d'abord l'idée que l'information est stratégique. Cette idée, qui s'appuie notamment sur les écrits de Wiener et von Neumann, est alors largement diffusée, tant dans l'establishment que dans la contre-culture ( « savoir, c'est pouvoir » ). Plus généralement, avec l'ordinateur on vend la modernité et un nouveau mode d'organisation de l'entreprise, de l'administration. L'information devient une nouvelle matière première, un nouveau carburant. Faisant le parallèle avec le charbon (la machine à vapeur) du 19e siècle, des idéologues technophiles prophétisent l'avènement d'une seconde révolution industrielle. Là où la génération précédente faisait des bestsellers à quelques milliers d'exemplaires vendus, on passe maintenant au million : de 1982 à 1988, IBM vend plus de 15 millions de PC.

En 1985, l'éducation nationale française lance le plan « informatique pour tous ».

Bibliographie

[Breton] Philippe Breton. Histoire de l'informatique. La Découverte. 1987.

[Flichy] Patrice Flichy. L'imaginaire d'Internet. La Découverte. 2001.

[NASA] Steve Garber. Sputnik and The Dawn of the Space Age. NASA. 21 fév. 2003. en ligne : http://www.hq.nasa.gov/office/pao/History/sputnik/.

[Huitema] Christian Huitema. Et Dieu créa l'Internet. Eyrolles. 1995.

[ISOC] † 2003. Barry M. Leiner, Vinton G. Cerf, David D. Clark, Robert E. Kahn, Leonard Kleinrock, Daniel C. Lynch, † 1998. John Postel, Lawrence G. Roberts, et Stephen Wolff. A Brief History of the Internet. version 3.32. Internet Society. 2003. en ligne : http://www.isoc.org/internet/history/brief.shtml. L'histoire d'Internet par quelques uns de ses pères..

[Negroponte] Nicholas Negroponte. L'homme numérique. R. Laffont. 1995. Les indications de page sont données à partir de la seconde édition anglaise..

[Verroust] Gérard Verroust. Histoire, épistémologie de l'informatique et Révolution technologique. Université de Paris VIII. 2006 (c. 10/4/2008). en ligne : http://hypermedia.univ-paris8.fr/Verroust/cours/TABLEFR.HTM.

[Wiener] Norbert Wiener. Cybernétique et société. 1952. trad. fr. de The Human Use of Human Beings (1950).